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Corinne Jullien



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Communiqué de Laurent Quénéhén - Art curator - Critique d'art

 

Corinne Jullien travaille instinctivement à partir de la couleur et de cette spontanéité nait des formes. C’est un processus très automatique qui peut rappeler l’expressionisme abstrait, c’est une énergie pure en action, mais Corinne Jullien compose également des rythmes figuratifs qui apparaissent comme des patterns car ils reviennent sur différentes toiles et dessins sur papiers.

Corinne Jullien joue de ces formes récurrentes, elles sont comme des archétypes qui émergent de l’inconscient, ce sont souvent des modèles primitifs, des symboles.

Cette manière de faire qui allie spontanéité et motifs rappelle les origines de la création : au début était le chaos. Puis un ordre se mit en place. On est dans le travail de Corinne Jullien à la source de l’humanité : le ciel, la terre, qu’elle peint toujours en premier ; puis viennent les éléments : la nature, les bêtes, les éléments, les abris.

Tout est dans ses œuvres à l’état primordial qui est aussi celui de l’enfance avec ses espoirs, ses doutes et ses angoisses. C’est ce qui permet aux contes racontés aux enfants d’êtres universels. L’histoire se révèle sous nos yeux car la peinture est un langage.

C’est en regardant ses œuvres que tout un chacun trouve matière à correspondances, à narration et à rêveries exponentielles. La peinture est sans fin, elle s’accorde avec l’infini de notre imagination.

Ce qui se raconte dans chacune des pièces de Corinne Jullien est une représentation composée de strates comme un mille feuilles. En extrapolant, ses œuvres peuvent s’apparenter au test de Rorschach, elles sollicitent la sensibilité et l’inconscient du visiteur.

L’interprétation de ses toiles et des œuvres sur papier en révèlent plus sur le regardeur qui les commente que sur la peintre elle-même. Les couleurs parlent, les formes discutent. Ses rouges coulent comme le sang dans les artères, ses déclinaisons de verts nous conduisent dans une campagne sauvage et ses bleus délavés habités de blanc nous transportent au ciel.

Des peintures de Corinne Jullien émergent des éléments grossis ou réduits comme nous les fournissent les rêves ou les fantasmes. Des rencontres ahurissantes se produisent. Le rêve est l’expression d’un désir, soit clair, soit dissimulé. Désirs de fuite, désir d’échapper à un piège, désir de rencontre. Nos désirs masqués se situent à la limite de la figuration et travaillent notre mémoire, nos souvenirs. Souvenirs réels ou faux souvenirs, l’esprit reconstruit le passé, l’imagine parfois.



Corinne Jullien nous propose un univers apparemment inoffensif, évocateur de contes et de légendes, dans les couleurs acidulées, empruntant les tracés faussement maladroits des illustrations pour la littérature enfantine. Mais tout ceci n’est qu’apparence, couverture pour un propos plus subversif. Son univers est d’une inquiétante familiarité, proche de l inquiétante étrangeté, l’Unheimlichkeit Freudienne. L’artiste renvoie au spectateur le reflet de sa propre histoire, image d’abord dérangeante puis qui une fois identifiée devient sienne. La mise à distance est opérée par le recours à de grands formats, apparemment incompatibles avec l’intimité des scènes figurées, et par l’imposante présence du personnage principal, rigoureusement centré. Mais ceci n’est qu’un leurre, un piège trompeur, car quiconque se hasarde à entrer dans ce travail est immédiatement happé par son propre point de vue, obligé de mettre son imagination à contribution pour combler les lacunes spatiales et narratives, de plaquer sa propre mythologie sur celle proposée par l’artiste.                                       
    Louis Doucet.
 Critique d’art, collectionneur.

                                 
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